image du film.UN MONDE NOUVEAU

Année : 2006. Durée : 1 H 05'

Fiche technique :
Réalisation, image, son, montage : Gérard Courant.
Assistant post-production : Mauricio Hernandez.
Production : Les Amis de Cinématon, Gérard Courant.
Distribution : Les Amis de Cinématon.
Tournage : 11, 13, 14, 19, 21 et 22 Novembre 2005 à Charenton-le-Pont (France), Fontenay-sous-Bois (France), Joinville-le-Pont (France), Nogent-sur-Marne (France), Paris (France), Saint-Mandé (France), Saint-Maurice (France), Vincennes (France).
Format : Vidéo Mini-DV.
Procédé : Couleur.
Collection publique : BNF (Bibliothèque Nationale de France), Paris (France).

Présentation >>>

Un monde nouveau est le quatrième volet de ma série cinématographique Mes villes d’habitation.

Un monde nouveau est un inventaire des 112 rues, routes et allées (dans une première partie) et des 14 places et squares (dans une seconde partie) du bois de Vincennes à Paris.

Un monde nouveau est, d’une certaine façon, la suite de Périssable paradis (2002), qui était un journal filmé sur le bois de Vincennes, dont la plus grande partie était consacrée aux méfaits de la tempête du 26 décembre 1999.

(Gérard Courant)

Critique >>>

L’ÉPREUVE DU LABYRINTHE

Gérard Courant filme des sensations d’individus. C’est un cinéaste du sens. Du sens caché. Il a un point de vue, c’est-à-dire l’endroit où il pose sa caméra. C’est ainsi qu’il donne son avis et même l’impose puisque celui qui est filmé n’a pas le choix du cadre.

Ce cinéaste méthodique, tout autant que par le plan fixe, se révèle à nous par une volonté de classification méticuleuse, voire maniaque. Quand il filme un objet inanimé : une maison comme dans Mes lieux d’habitation (encore qu’intérieurement toute maison, même vide, soit hantée), des rues (comme à Saint-Marcellin dans À travers l’univers), etc., il lui redonne vie. Il en est le prince charmant.

À bien y réfléchir, Courant ne pouvait pas ne pas filmer le bois de Vincennes (ou un autre bois du même genre) parce que celui-là n’est pas un vrai bois, mais sa représentation structurée. Le bois est cerné, clôturé par les villes-frontières qui lui font face. Mieux : le bois est un labyrinthe. J’entends bien qu’on en sort, même sans fil d’Ariane, quoique certains soirs, on y croise des minotaures de toutes sortes...

En filmant les artères du labyrinthe – et je prends artère dans son sens médical : qui permet la circulation de la vie – Courant, benoîtement, c’est-à-dire tel un bénédictin, en cherche le sens caché tout comme il en cherche un devant des êtres de chair.

Il y a un début d’explication. Dans la dernière partie du film, il révèle sans ordre géographique, les places. Il avoue donc que le dédale mène obligatoirement à la forme littérale du mandala : le cercle, mandala que Jung désigne comme « une représentation symbolique de la psyché, dont l’essence nous est inconnue ».

Courant n’est pas au bout de ses peines, mais au fur et à mesure qu’il traverse l’épreuve du labyrinthe, il se rapproche du cosmos, de son cosmos.

L’heureux homme.

(Alain Paucard, 30 septembre 2006)



AVANT ET APRÈS LES RAVAGES DE LA TEMPÊTE DE 1999

A la suite de Périssable paradis, montage d'archives et de carnets filmés montrant le Bois de Vincennes (94) avant et après les ravages de la tempête de 1999, Un monde nouveau établit l'inventaire filmé et classé par ordre alphabétique des 112 rues, routes et allées, ainsi que des 14 places et squares du Bois de l'Est parisien.

Où l'on aperçoit les allées et venues des joggers et des promeneurs, un peloton de cyclistes et des amoureux les pieds dans l'herbe.

(Loïc Bagès, Forum des images, 2009)



ON EN APPREND AUTANT SUR CELUI QUI REGARDE QUE SUR CELUI QUI EST REGARDÉ

Un monde nouveau prend donc la quatrième place dans la série Mes villes d'habitation. Le principe est inchangé : filmer une vue de chaque rue d'une ville ou d'un vaste quartier dans lesquels Gérard Courant a vécu, un plan de la plaque portant le nom de la voie la précédant invariablement.

A travers l'univers nous emmenait dans la petite ville de Saint-Marcellin, Un monde nouveau dans le quartier du bois de Vincennes, dans ses 112 rues et 14 places. D'un film à l'autre, la durée des plans a semble-t-il légèrement raccourci, tenant ici dans à peine plus de vingt secondes. L'une des lignes de force qui sous-tendait A travers l'univers est moins repérable cette fois. De "chaque prise raconte une histoire", on passe plutôt à "chaque prise est une composition et une dynamique". Peut-être le sentiment de ce déplacement est-il en partie dû à cette durée des plans, ce qui nous fait dire qu'en dessous de vingt secondes, l'expérience ne fonctionnerait plus (ou du moins, fonctionnerait de manière totalement différente). Il n'y aurait plus cette suite d'événements du réel mais un simple catalogue d'instantanés.

Mais sans doute est-ce dû surtout à la réalité géographique du bois de Vincennes. Le paysage qui s'offre à nous le long de ces soixante-cinq minutes n'est pas aussi varié que celui de Saint-Marcellin. Il n'est fait d'ailleurs que de deux types de voies : d'une part les abords du bois, les avenues, le périphérique et l'autoroute, d'autre part les petites routes, les chemins, les allées à l'intérieur. Les premières voies sont laissées aux voitures, les secondes aux promeneurs et aux sportifs, et la frontière entre les deux est marquée, visuelle et sonore. Ainsi, les activités présentées varient peu : joggers, cyclistes, rollers et cavaliers croisent les familles, les chiens et les retraités.

Le statisme imperturbable du cadre enregistre d'autant mieux, rend d'autant plus sensible les mouvements, les traversées dans le plan étant régulières, dans toutes les dimensions de l'espace. Devant ce spectacle, nous prenons également conscience des différences de vitesse qui s'y déploient. La vie, en effet, n'a pas le même rythme pour les dynamiques coureurs, pour les vieilles personnes avec canes et pour les enfants joueurs (les plus spontanés, ceux qui osent les "Regarde Maman ce qu'il fait le Monsieur..."). C'est ainsi, avec ces "poèmes cinématographiques du réel", que l'on en apprend autant sur celui qui regarde que sur ce (ou celui) qui est regardé.

(Édouard Sivière, Nightswimming, 18 septembre 2012)


 


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