JEAN EUSTACHE, JOHN LENNON ET LES CONTES DE LA LUNE VAGUE APRÈS LA PLUIE.

Date : 01/01/1981

Voici une histoire qui est arrivé à Jean Eustache. La scène se passe chez le cinéaste. Il est alité, les deux jambes emprisonnées dans le plâtre après un énième suicide manqué (Il a sauté par la fenêtre du deuxième étage d’une maison en Grèce !). Jean passe une grande partie de son temps à visionner et revisionner des films en cassettes. Quand on lui rend visite, il convie ses invités à regarder tel film de Mizoguschi ou de Lubitsch avec, ensuite, en point d’orgue, ses commentaires très avisés. Du grand art !

Un jour, au début de l’année 1980, il programme le chef d’oeuvre de Mizoguschi, Les contes de la lune vague après la pluie. Comme tout bon enregistreur de films à la télévision du service public, il prévoit toujours des minutes supplémentaires avant le début et après la fin du film pour éviter que ce dernier soit coupé. Quelques mois plus tard, il regarde enfin l’enregistrement télévisé du film qu’il connaît sur le bout des doigts pour l’avoir vu des quantités de fois à la Cinémathèque ou au Quartier Latin. Comme c’est souvent le cas, le film a été programmé par FR3 avec du retard et le magnétoscope a enregistré la fin du journal télévisé du soir qui précède la séance du Ciné-club. Parmi les informations, l’une arrive l’attention de l’auteur de La Maman et la putain : on annonce que John Lennon et Paul Mac Cartney sont sur le point de reformer Les Beatles. Ça serait une information banale si : 1) John Lennon n’était pas assassiné peu de temps plus tard ; 2) le film qui est programmé à la suite de cette information du journal télévisé raconte une histoire de fantôme. Comme si la mort de John Lennon était déjà annoncée et programmée à l’avance.

Gérard Courant.
Inédit, 1981.

 


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